Voici une interview du journal belge Le Soir parue le 22 juin en pleine tournée Mezmerize donc (désolé de pas l'avoir donnée tout de suite mais bon mieux vaut tard que jamais:
http://www.leguide.be/Guide/musiques/page_5377_342920.shtml« La Turquie doit faire face à son histoire» Même si nous avons tous grandi à Los Angeles, nous sommes restés accrochés à nos racines, explique le chanteur de System of a Down, Serj Tankian, le
long chevelu à l'arrière-plan. System of a Down n'a pas, comme c'est la mode, envoyé de disques numérotés et nominatifs à la presse pour prévenir une diffusion massive et précoce de son nouvel album, « Mezmerize », sur l'internet. À vrai dire, System of a Down n'a pas envoyé d'album du tout. Une seule écoute, collective, fut donc prévue quelques heures avant les interviews. Sur les canaux amstellodamois, dans un bateau-mouche amarré. « Pourquoi envoient-ils toujours les pauvres », questionne et martèle Serj Tankian sur le single « B.Y.O.B. », en référence à la guerre, évidemment. Le chanteur n'a pas sa langue en poche. Confirmation.
Le Soir - Pourquoi avez-vous décidé de sortir deux albums à six mois d'intervalle ?
Serj Tankian - System of a Down a dû enregistrer 300 morceaux, et la plupart ne sont jamais sortis. J'écris plus de musique que je ne pourrai jamais en faire entendre. Ou alors, peut-être, après ma mort. Cette fois, il y avait trop de compos qu'on voyait bien sur notre disque pour n'en sortir qu'un. On s'est dit qu'on allait en faire un grand. Un double. Mais on ne veut pas noyer. Lasser. Fatiguer. On aurait très bien pu sortir ces deux disques d'un coup. Dans le même package. Mais nous voulions laisser à chacun le temps de respirer. Cet enchaînement de « Mezmerize » et « Hyptonize » est un double album sans en être un.
- Vous vous rendez quand même bien compte que certains mettront cette tactique sur le compte du business ? De la rentabilité ? Des gros sous ?
- Je me fous de la réaction des gens. S'ils aiment notre musique et qu'ils veulent acheter ce disque, ils le peuvent. Tant mieux. Sinon, tant pis. Pour moi, c'est du pareil au même. Il ne sert à rien de se creuser les méninges pour prévoir ce que les auditeurs vont penser. On doit faire ce qui, d'après nous, est bon pour nos chansons.
- A quels besoins répond la création de votre label ?
- Je tenais à défendre une musique que le public n'a pas l'habitude d'entendre, à promouvoir des albums créatifs qui ne seraient pas commercialement viables. Je m'investis dans le développement d'artistes. C'est beaucoup de travail. Beaucoup de responsabilité. Je produis ou coproduis la plupart d'entre eux. Histoire d'être sûr que tout se passe bien. J'essaie de leur décrocher des concerts, des tournées. Je m'assure que les labels partenaires font leur job. Cela m'a appris beaucoup de choses et je suis heureux de faire partie du processus qui défend les musiques contemporaines.
- Pourquoi tenez-vous tant à la reconnaissance du génocide arménien ?
- Même si nous avons tous grandi à Los Angeles, nous sommes restés accrochés à nos racines. Nous voulons perpétuer la conscience de cette tragédie. De cette catastrophe perpétrée en 1915 par les Turcs ottomans. Plus d'un million et demi de gens sont morts. Ont été tués. Il y a des Turcs qui, en dehors de leur pays, ont dénoncé la position de leur gouvernement. D'autres le font à l'intérieur même de leurs frontières et sont persécutés. Il est temps que l'Etat arrête le négationnisme, la désinformation. Il bafoue la liberté d'expression. Cette reconnaissance est encore plus importante à mes yeux depuis que la Turquie veut entrer dans l'Union européenne. Elle doit faire face à son histoire. N'oubliez pas l'invasion de Chypre dans les années 70. Le parlement européen, qui a reconnu le génocide arménien, doit stopper cette hypocrisie. Vous imaginez l'Allemagne, au beau milieu de l'Europe, qui nie l'holocauste ? Comment accepter dans l'Union un pays qui a commis un génocide et ne le reconnaît pas ? C'est ce que je demande à son parlement. Et à la Belgique !